Une nouvelle fois, Tokoyami s’était rendu sur ce trou paumé qu’était l’île Toroa. S’il n’y allait la plupart du temps que très rarement, son arrivée récente était motivée par la récupération d’une prime placée sur la tête d’une bande de bandits y ayant trouvé refuge. Mais, en l’absence de son partenaire de fortune, le jeune homme en était venu à décider de passer le temps. Une tâche ô combien fastidieuse sur une île aussi petite et vide d’intérêt, du moins aux yeux d’Ojin.

Pourtant, alors qu’il déambulait entre les différents commerces insulaires, le jeune homme croisa la route d’un événement bien incongru… et embêtant. En effet, le port étant situé à quelques mètres et par conséquent la mer aussi, le borgne bénéficiait d’une bonne vue sur l’océan. Océan qui commença à se lever tel un géant s’extirpant du sommeil, s’élevant même en une vague de plusieurs mètres de haut. Une véritable catastrophe se préparait… et les villageois le savaient, puisque la place du marché s’agita rapidement pour laisser place à un véritable chaos. Chacun se marchait sur l’autre, tentant tant bien que mal de se ruer à l’intérieur des bâtisses. Tokoyami, lui, se contenta alors simplement de se jeter sous une étal de marché avant l’impact.

…

L’impact fut relativement clément. Si la vague balaya tous les emplacements marchands ainsi que leurs cargaisons, tout le monde s’en sortir sans trop de mal, le chasseur de primes avec. Comble de l’improbable, la vague semblait même avoir emporté plusieurs poissons avec elle pour les échouer alors sur l’île, laissant les animaux gesticuler et suffoquant peu à peu hors de l’eau. Au moins l’île avait-elle de quoi manger pour la semaine sans s’embêter à pêcher.

“ … Bien. “

Le jeune homme, bien peu perturbé, se redressa alors avec flegme et alluma sa pipe, constatant les dégâts depuis son kimono trempé. Mais alors qu’il tentait de remettre les événements dans l’ordre au sein de son esprit, les habitants sortirent de leurs habitations, tremblants et apeurés, pour pointer le borgne du doigt. Le voila dans de beaux draps.

“ Lui ! C’est lui qui a provoqué la colère des océans ! Regardez, il n’a rien ! “

Tokoyami fronça les sourcils, affichant un rictus méprisant.

“ L’impact était violent certes, mais je ne m’attendais pas à ce qu’il vous fasse perdre tant de neurones. “

Dit-il en essorant son kimono sous les vociférations des villageois.